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"Pour un monde meilleur"

Chapitre I - Chapitre II - Chapitre III - Chapitre IV

Roman policier

Chapitre I
Un justicier
Coéquipiers
Mystère
L'Organisation
Coup de foudre

Mystère

Il était bientôt l'heure de se coucher. Roman descendit ses poubelles, remonta, prit un bol d'air sur sa terrasse en compagnie de son chat pendant quelques instants sous un ciel merveilleusement étoilé... La fraîcheur du soir les invita à rentrer, il ferma les volets de la salle de séjour, fit quelques pas et aperçut à nouveau son stylo (un cadeau d'anniversaire) par terre à peu près au même endroit. Il mit ses mains sur ses hanches et le fixa des yeux interrogateurs en réfléchissant pendant quelques secondes. Il alla dans sa chambre, prit une séance de relaxation d'une demi-heure et se coucha à l'instar de Moustache, insouciant, bien qu'une idée saugrenue lui traversa l'esprit.

  Après avoir passé une bonne nuit, Roman se leva comme d'habitude mais avec la ferme intention de trouver quel fantôme -si fantôme il y a- perturbait la tranquillité de son foyer. Il prit l'annuaire posé à côté du téléphone, s'affala dans un fauteuil de la salle de séjour. Il chercha à...V et lut : "MIST. Voyants, astrologues, consultations sur rendez-vous, tél...".
- Qu'est-ce que tu en penses, Moustache, j'y vais ou je cherche autre chose ? Un miaulement pour OUI, deux miaulements pour NON.
- ...
- Tu réfléchis ? Prends ton temps... Un voyant peut-il voir l'invisible ? Pardon, quelle question !
  Il prit un crayon et s'apprêtait à noter le numéro de téléphone. Mais lorsqu'il commença à écrire le premier chiffre, sa main se mit à bouger seule et forma à toute vitesse les lettres : "Lar". Il fit un bond dans son fauteuil en lachant son crayon, laissant le mot inachevé ; Moustache disparut en un clin d'oeil dans une autre pièce, les poils hérissés, après avoir poussé un grognement. Son maître se précipita d'un pas décidé dans la chambre, décrocha un petit crucifix devant lequel il avait l'habitude de méditer et le posa à côté de l'annuaire. Il s'en alla chercher le félin mais en vain. Lorsqu'il revint, il s'aperçut que les pages du Bottin avaient été tournées. Or il n'avait décelé aucun courant d'air. La présence du crucifix était inefficace, pourtant Roman croyait fermement à ses effets pour chasser les démons. Le coeur battant, il était persuadé malgré tout que son logement était hanté. Il referma l'annuaire, s'habilla calmement, vérifia que les volets étaient fermés et remarqua que le ciel était en train de s'assombrir par l'amoncellement des nuages. Il repartit chercher Moustache dans tous les coins. Il regarda dans la salle de bain et poussa un ouf ! de soulagement :
- Alors Moumou, on me fait une farce ?
Tranquillisé, il endossa son imperméable, s'empara de son parapluie et, en compagnie de Moustache, quitta l'appartement. Il prit son véhicule et arriva à l'église cinq minutes plus tard en raison de la rue à sens unique. Il pleuvait à torrent, sans quoi il serait parti à pied, il aurait mis le même temps.
  Il laissa le chat sur la banquette arrière, ferma la portière à clef et monta les marches de l'église. Après avoir trempé ses doigts dans l'eau bénite, fit un signe de croix et alla à la sacristie. Un jeune prêtre d'une trentaine d'année lui tournait le dos, se préparant à célébrer sa prochaine messe.
- Excuse-moi Henri, puis-je te parler un instant, dit Saint
- Tiens, Bonjour Roman, comment va la petite ?
- Elle sera opérée dans deux jours.
- C'est la meilleure solution, je prierai pour elle. Que puis-je faire pour toi, cher ami ?
- Crois-tu aux fantômes ?
- Je crois à l'existence du diable et de ses oeuvres. Pourquoi, tu as vu un fantôme ? lui demanda le prêtre en souriant.
  Roman lui raconta les moments qu'il avait vécus le matin... L'ecclésiastique le crut sur parole, lui proposa de voir un exorciste, à la retraite, et lui donna ses coordonnées. Aussitôt Roman sortit son téléphone portable et l'appela.
- André Vogel, bonjour ! dit une voix rauque.
- Bonjour mon père, je m'appelle Roman Saint, je vous téléphone de la part du père Henri Bonvoisin...
Il lui raconta de la même façon ses mésaventures surnaturelles.
- Mon fils, à mon avis, votre appartement n'est pas hanté, en tout cas pas comme vous l'entendez. Si c'était le cas, vous n'auriez pas passé cette nuit à dormir si paisiblement. Ce serait l'appartement entier qui serait sans dessus-dessous et non pas un stylo qui serait tombé. De plus votre séance de relaxation n'a pas été perturbée.
- Mais alors comment expliquez-vous ces phénomènes ?
- L'esprit de quelqu'un qui ne vous veut que du bien cherche à vous communiquer par l'intermédiaire de l'écriture automatique. C'est un fait rarissime. Il y a des gens, ou plutôt des âmes, Dieu seul sait pourquoi, qui possèdent une sorte de don qui leur permet de manipuler les objets légers, certains arrivent même à vous faire sentir leur présence. Vous en avez déjà entendu parler, je suppose ?
- Oui, en effet, mais je ne crois pas trop à ces choses là, vous savez.
- On les appelle des fantômes et on les considère comme des êtres malfaisants, mais en général ils ne sont là que pour de bonnes raisons. Et la personne qui reçoit ce genre de communication ne doit pas en abuser mais l'utiliser uniquement pour une bonne cause. Soyez prudent toutefois car communiquer avec l'au-delà n'est pas forcément communiquer avec Dieu ou ses saints, jamais de cette manière en tout cas. Excusez-moi, je reçois un appel, je dois vous laisser. Que le Seigneur vous protège !

  Roman, très intéressé par ce que lui avait dit le viel homme, s'empressa de rentrer chez lui sans même faire ses courses, curieux de savoir qui était cet esprit. Le chat avait tout ce qui lui fallait. Rencontrer un fantôme, c'était bien la première fois de sa vie que cela lui arrivait. Mais qui de surcroît lui voulait du bien alors que ces entités avaient la réputation de ne faire que du mal. C'était vraiment un privilège qui n'arrivait probablement pas à tout le monde.
Il rangea son véhicule presque vide d'essence, sur le parking, pénétra dans le hall de son immeuble, sans ouvrir sa boîte aux lettres. Il grimpa les marches de l'escalier quatre à quatre et, juste avant d'atteindre la porte de son appartement, il entendit le téléphone sonner. Il posa Moustache, ouvrit rapidement, courut jusqu'au salon et décrocha le combiné. "Roman Saint, j'écoute".
- Pouis-je parler à Mister Gonzales ? dit une voix avec un accent anglais.
- Vous faites erreur, monsieur, il n'y a personne de ce nom-là ici.
- Exkiousez-moa.
Il retourna fermer la porte suivi du chat qui poussa quelques miaulements, pas pour crier famine mais plutôt pour lui indiquer qu'il fut l'heure de la soupe. Avant toute chose il alla dans le salon, s'empara du fameux stylo et d'une feuille de papier, se prépara à écrire et attendit. Deux minutes s'écoulèrent, rien ne se passa. Puis encore cinq minutes, pas un seul mouvement, "c'est quand il veut l'ami", dit-il. Abandonnant sa tentative pour la reporter à plus tard et en sifflotant il sortit du réfrigérateur tout ce qui avait été prévu pour le dîner : une pizza congelée, une tranche de flan, du Vitaminou en conserve pour son compagnon puis il déboucha une bouteille de chocolat au lait, alluma son téléviseur et se mit à table.
  Le ciel s'éclaircissait peu à peu et la pluie venait de cesser. Il regarda l'horloge de la cuisine : 13 h 50. Roman termina seul son repas tandis que Moustache digérait en s'amusant comme un fou avec une balle de tennis de table qu'il venait de lancer. Le téléphone sonna à nouveau.
- Roman Saint, j'écoute !
- Commissaire Fourreau. Rien de spécial ?
- Je suis sur quelques pistes, je vous tiendrai bientôt au courant.
- En fait, la jeune femme qui est venue chercher la Peugeot noire ferait partie du groupe de malfaiteurs. La maison où habitaient les parents de Schultz à Senlis avait été louée. Elle est maintenant complètement vide. Son ou ses occupants sont partis probablement avant le vol du véhicule. Alors, de deux choses l'une, ou les parents sont complices, ou ils n'habitaient plus là. Pourtant sur l'état civil du père, celui-ci habite toujours à la même adresse... Voilà, si cela peut vous aider, Monsieur Saint, inutile donc de chercher de ce côté là. Avant de continuer à interroger les victimes, je vais voir du côté de la mère de Schultz qui était séparée de son mari.
Tous les deux se demandaient pourquoi les malfrats avaient cessé leurs activités depuis quelques temps, peut-être avaient-ils ce qu'il leur fallait ou étaient-ils en train de préparer un nouveau "Pique Banq" ?

  Roman revenait sur ce qui s'était passé avec l'entité. Il réfléchissait à propos des lettres "Lar". Le début probablement d'un nom propre ou commun qu'il aurait pu laisser se terminer. Il lui revint en outre en mémoire que les pages de l'annuaire s'étaient tournées seules alors qu'il avait insisté sur la tranche du bottin. Ce signe lui était encore plus incompréhensible que le premier. Y aurait-il un rapport entre les deux événements ? Il hésita un insant, ne doutant pas de la réapparition du fantôme, il décida de le laisser lui préciser son intention. Mais, un fantôme gentil ne devrait pas faire peur à un gentil matou comme Moustache en supposant que les animaux aient un certain sixième sens. Or, le seul fait de sentir la présence d'un être surnaturel l'effrayait, peut-être parce qu'incompatible avec sa nature, comme celle de l'homme l'est avec le surnaturel.
Il fallait qu'il retourne chez Simonet pour voir à nouveau cet employé qui lui paraissait douteux. Mais avant toutes choses, il devait sortir faire le plein puis les courses, étant donné qu'il avait consommé le repas prévu pour ce soir... Il lui restait juste le temps d'aller enseigner à l'école où il aperçut deux nouveaux élèves en cours, un garçon et une fille, de 14 et 15 ans. C'étaient les enfants de Fourreau. Ce qui lui fit drôlement plaisir car c'était pour lui un honneur de la part du commissaire. Il les invita à venir lui rendre visite le week-end suivant. Il remit l'affaire Simonet au lendemain.

Le soleil dardait de ses rayons à travers les vitres de la chambre tandis qu'il faisait encore froid pour la saison. Roman téléphona à son ami Fourreau après avoir pris le petit déjeuner avec son chat qui l'observait comme s'il participait lui aussi à l'enquête :
- Monsieur le commissaire, j'ai quelques soupçons sur un membre du personnel du garage Simonet. Vous serait-t-il possible de me fournir l'adresse du mécanicien ?
Un indicateur de la trempe de Roman ça ne se refusait pas.
- Je vous communiquerai ça mais il va de soi que toute cette affaire ne devra pas révéler notre étroite collaboration. Vous resterez toujours mon indicateur et rien d'autre officiellement.
- Tout à fait d'accord, M. le commissaire. C'est la raison pour laquelle je vous avais invité à ce que l'on se voit discrètement aux Buttes Chaumont. Vos supérieurs n'en sauront pas plus.
- En mon absence, mon adjoint, le commandant Leclerc me remplace. Idem pour lui, vous êtes mon indicateur.

  20 heures 30, Roman rentra chez lui après ses cours. Le chat se précipita et se frotta contre lui en miaulant et ronronnant. S'il l'avait pu, il lui aurait demandé s'il avait passé une bonne fin d'après-midi avec ses élèves. Mais son maître avait compris. Un seul regard suffisait. Il le prit dans ses bras et le câlina avec plaisir en lui donnant un bout de crevette rose. Il alluma son téléviseur et sortit le dîner tout prêt de ses sacs à provisions : Un sandwich au thon et à la tomate, un yaourt à la crème chantilly, une bouteille de jus de pomme, quelques crevettes roses et du riz cantonnais. Il prépara la table, y installa Moustache avec son assiette habituelle. Soudain, il entendit un bruit dans le salon comme si quelqu'un avait donné un coup de poing sur la vitre. Il se leva et gagna rapidement la pièce pour apercevoir un volatile de la taille d'un pigeon s'éloigner de la fenêtre fermée. Il sourit et dit : "J'espère que tu vois les carreaux, Moustache, sinon je vais être obligé de les peindre. Cela ne t'est encore jamais arrivé mais qui sait avec l'âge la vue baisse". Il se demanda ensuite si ce n'était pas un signe de l'homme invisible. Dans ce cas, que voulait-il dire. Ou alors aurait-il un tempérament de farceur ?


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